• 1) Le sixième millénaire


    Au 6eme millénaire (6200-5200) la culture néolithique de Cris-Körös-Starcevo est la première population d'agriculteurs des Balkans, venus de la vallée du Danube; elle est principalement située sur les territoires des actuelles Roumanie, sud de la Hongrie et Serbie.

     

    L'Europe Centrale et la Steppe Pontique (1)

                                                               Localisation de la culture de Cris-Körös-Starcevo . 6200-5200 av.JC. (2)

     

    Plus à l'est, au delà du fleuve Dniestr dans l'actuelle Ukraine,  au nord de la Crimée, se trouvaient les chasseurs-cueilleurs de la culture Bug-Dniestr. Ceux-ci élaborent déjà une céramique très primitive qui s'est répandue dans toute la steppe pontique depuis le 7eme millénaire depuis la culture Elshanka des chasseurs de la rivière Samara entre Oural et Volga.
    Plus à l'est encore, se trouvent les chasseurs-cueilleurs de la culture Dniepr-Donets I.

    A partir de 5200, la culture néolithique de Cucuteni-Tripolye (et Dniepr-DonetsII) remplace ces cultures depuis la Moldavie roumaine jusqu'à Kiev sur la Dniepr, (et jusqu'à  la Donetz) et ce pendant près de 2000 ans.

     

    L'Europe Centrale et la Steppe Pontique (1)

    Localisation de la culture de Cucuteni-Tripolje  5200-3000 av.JC. (3)

     

     


    Ces populations fabriquent une belle céramique peinte très caractéristique, habitent de grands villages de plus de 200 maisons sur plusieurs dizaines d'hectares, cultivent le blé, l'orge, les pois, et confectionnent des petits bijoux et des haches en cuivre.
    On ne connait pas précisément leur mode d'inhumation mais on retrouve de nombreuses statuettes féminines caractéristiques.


    2) Le cinquième millénaire


    Dans la steppe entre la Volga et le fleuve Oural, une culture d'éleveurs de chevaux apparait dans la région de Samara entre 4700 et 3800 av.JC.
    Leurs tombes sont collectives, des fosses de 2 à 6 personnes, ou individuelles; les corps sont allongés sur le dos, genoux repliés, et recouverts d'ocre. On observe beaucoup de sacrifices de chevaux, sans doute domestiques.


    La première domestication du cheval apparait dans les steppes probablement vers 4800 avant JC. Les chevaux sont montés au nord du Kazakhstan vers 3700 ou 3500 av.JC. à l'est de l'Oural, au nord-est de la mer Caspienne, par une population de chasseurs.

    Il est probable que ces chasseurs ont appris la monte de leurs voisins éleveurs de l'ouest, donc des steppes pontiques vers 4500 avant JC.

    Dans la steppe qui s'étend à l'est de la Dniepr jusqu'à la Donetz et au Don , la culture de Sredni Stog apparait entre 4400 et 3400 av.JC.

    Ils décorent leurs poteries par des impressions à la cordelette et des incisions en triangles. Les défunts sont inhumés individuellement sur le dos, les genoux relevés, parfois sous un petit tertre de terre, sans doute les premiers kurgans. Ce sont également des éleveurs de chevaux. Leur origine pourrait provenir de la culture de Marioupol vers l'Oural.


    En réalité, on trouve les premières sépultures de chevaux dans la culture de Khvalinsk sur la Volga inférieure, au début de 5ème millénaire (5200-4500).

    Dès 4300, une partie de ceux-ci quitte la steppe et migre vers la Dniepr et le delta du Danube et constitue le complexe Suvorovo-Novodanilovka.



    3)    Le quatrième millénaire


    Entre 3900 et 3600, ces populations des steppes ont été assimilées localement et forment la culture de Cernavoda sur le delta du Danube.


    Leur céramique est décorée à la cordelette, ils pratiquent l'élevage de moutons et de chèvres et la transhumance, les kurgans disparaissent pour des tombes plates.


    Vers 3600, ces pasteurs sont en contact avec la culture de Baden du milieu du Danube (Hongrie) et le cheval se répand en Europe centrale.


    On suppose que les hommes de Suvorovo parlaient une langue pré-Anatolienne, une partie de leur descendants auraient migré vers le sud, fondé la ville de Troie vers 3000 avant JC. puis occupé l'Anatolie pour fonder le royaume Hittite.

    Les premiers contacts entre les steppes au nord du Caucase et la civilisation urbaine d'Uruk en Mésopotamie au sud interviennent entre 3700 et 3500 avant J.C. et font apparaitre rapidement une élite riche qui utilise les premiers chariots et les premiers alliages de bronze, échange chevaux, laine, peaux d'antilopes et minerais.

    On donne le nom de Maykop à cette culture située dans le Kuban, au nord du Caucase, entre mer noire et Caspienne.

    Ces hommes de Maykop parlaient probablement une langue Caucasienne non Indo-Européenne; leur céramique est de type steppique, ils élèvent des porcs, des moutons et des bovins. Leurs maisons sont en bois et torchis et leurs sépultures sont de grands tumuli appelés Kurgans, parfois entourés de cercles de pierres.

    A l'Ouest, entre 3600 et 3400, les villes de Tripolye en Ukraine deviennent très vastes et très importantes, mais sans organisation centrale religieuse ou politique; puis elles disparaissent vers 3300.


    A l'Est de la rivière Oural, des populations des steppes migrent vers l'Altaï au Kazakhstan vers 3500, et donnent naissance à la culture d'Afanassievo à l'origine des langues tokhariennes.

     

    Durant cette première moitié du 4ème millénaire, la zone des steppes est occupée par cinq populations énéolithiques (2)  qui forment le berceau de la culture Yamnaya,

    à savoir: Sredni Stog final, post-Mariupol, Mikhailovka I, Khvalynsk final et Repin à l'est



    Dans la seconde partie du millénaire (3400-3200 av. JC.), cette culture de Yamnaya, ou culture des Tombes à Fosses, s'étend des bords de la basse Volga et du Don jusqu'à la Dniepr puis à toutes les steppes pontiques.


    Il s'agit de populations nomades, plus agricole à l'ouest et plus pastorale à l'est, qui élèvent chevaux, bœufs et moutons, qui utilisent des chariots pour ses déplacements et sans doute ses habitations, chariots que l'on retrouve souvent dans les tombes à Kurgans des élites, hommes ou femmes. Les défunts sont allongés sur le dos, genoux repliés avec saupoudrage d'ocre, orientés vers l'est, dans des fosses tendues de nattes, sous un tumulus ou Kourgan.
    Les poteries en forme d'œuf sont décorées d'impression au peigne et à la cordelette, les armes sont des poignards et des haches moulées plates en cuivre.



    Un peu plus tard, à partir de 3200 av JC. la culture de Kemi-Oba, spécifique de la presqu'île de Crimée, se caractérise par une céramique sombre et des stèles funéraires anthropomorphes que l'on retrouvent également ensuite dans le Caucase et étrangement en Italie dans le nord de la Toscane (peut être un lien par un commerce maritime entre mer noire et méditerranée).



    Les sociétés Yamnaya ont apparemment bénéficié de plusieurs avantages liés à leurs spécificité:
    Les Yamnaya ont domestiqué et sélectionné des chevaux plus grands dans les steppes, et ils en ont fait le commerce (de grands chevaux sont retrouvés dans les tombes du Danube à la fin du millénaire).
    De plus ils les ont monté, ce qui leur a permis d'aller plus loin, de gérer de plus grands troupeaux, de conduire des raids militaires etc.
    Leur croyances "Indo-Européennes" ont permis de développer la notion de serment liant les clients à un protecteur en échange de protection et de loyauté et services. Ces pactes protecteur/client se sont étendus et ont favorisé leur migration.



    Un premier mouvement de population Yamnaya s'est produit vers l'ouest à partir de 3300 av.JC. et a entrainé la disparition des grandes communautés du Tripolye.


    Les agriculteurs Tripolye qui subsistent dans la vallée du Dniestr en petits villages de 40 maisons cohabitent avec une population des steppes, la culture d'Usatovo. (pacte clients/protecteurs). Les cimetières sont mixtes, avec des kurgans et des armes en bronze et d'autre part des tombes plates à figurines féminines.
    Les habitations sont côtières, de nombreux objets, poteries, bijoux sont importés (ambre, perle de verre, poterie Maykop, Cernavoda) ce qui indique un commerce important sans doute maritime.

    On  peut supposer une expansion vers le nord-ouest et un pacte avec les populations de la culture des vases à entonnoirs d'Europe centrale qui auraient ainsi adopté un langage Indo-Européen.

     



    4)    Le Troisième millénaire


    Au tournant du 3ème millénaire, les pasteurs Yamnaya s'installent dans le delta du Danube puis remontent dans la plaine de Hongrie.
    Leur style de céramique évolue, elles sont décorées d'impressions à la cordelette et sont incrustées de peinture blanche.

    - En Roumanie de l'ouest et Transylvanie, ils entrent en contact, pactisent puis cohabitent avec les agriculteurs locaux de la culture de Cotsofeni qui vivent en petits groupes de quelques cabanes, incinèrent et enterrent leurs morts dans des tombes plates. De là viendrait la diffusion d'une langue IE proto-celtique et proto-italique en Hongrie de l'est.Au nord des steppes:

    - A l'est des montagnes de l'Oural, au nord des steppes, des vestiges de villages fortifiés datés de 2800 à 1800 av.JC. caractérisent la culture de Sintasha.

    Il s'agit d'éleveurs, guerriers, métallurgistes, des tombes plates sont associées aux Kurgans des élites, et il semble qu'ils aient les premiers mis au point les chars de guerre à deux roues.
    Cette culture Sintasha serait à l'origine des populations Indo-Iraniennes.

    - Au proche orient, Sargon d'Akkad unifie les royaumes de Mésopotamie et de Syrie au 24ème siècle av.JC. Les chevaux font leur première apparition. L'Elam se trouve à l'ouest de l'Iran; La civilisation Harappéenne est alors centrée sur le fleuve Indus.


    En 2170, les Akkadiens sont envahis par les Guti venus de l'ouest de l'Iran. Puis ceux-ci sont repoussés en 2100 par un roi d'Ur. Les chevaux sont retrouvés dans l'ouest du plateau iranien et se multiplient en Mésopotamie.


    Vers 2000 av.JC. la Mésopotamie passe sous la domination de l'Elam et Shimashki.


    Ceux-ci commerçaient les métaux et les chevaux avec la culture de Shintasha deux milles kilomètres plus au nord. Les chars de combat à deux roues font leur apparition dans la région au 20ème siècle av.JC.


    L'étain nécessaire à l'élaboration du bronze est alors le commerce le plus important du Proche Orient. La principale source provenait probablement du Tajikistan, de la ville de Sarazm au bord de la rivière Zeravshan.

     

    Sources & notes

    (1) D.W. Anthony, 2007 "The horse, the wheel and the language. How Bronze-Age riders from Eurasian steppes shaped the modern world" , Princeton University Press.

    (2) Astalos, Ciprian & Sommer, Ulrike & Virag, Cristian. (2013). Excavations of an Early Neolithic Site at Tăşnad, Romania. Archaeology International. 16.

    (3) Chapman, John & al. (2014). The Second Phase of the Trypillia Mega-Site Methodological Revolution: A New Research Agenda. European Journal of Archaeology. 17. 369-406.

    (2) Enéolithique: période de la fin du néolithique avec premiers objets en cuivre.

     

    P. Bosch-Gimpera, 1961: "Les indo-européens. Problèmes archéologiques", Payot, Paris
    L.L. Cavalli-Sforza, 1996: "The spread of agriculture and nomadic pastoralism insights from genetics, linguistics and archaeology", in D.R. Harris(ed.),The origins and spread of agriculture and pastoralism in Eurasia,Routledge, p51-69

    C. Renfrew, 2002: "The emergind synthesis’: the archaeogenetics af farming/language dispersals and other spread zones", in P. Bellwood, C. Renfrew (ed.),Examining the farming/ language dispersal hypothesis, McDonald Institute for Archaeological Research, University of Cambridge, p. 3-16

    M. Gimbutas, Colin Renfrew,1990 " Archaeology and language. The puzzle of indo-european origins" (review), The American Historical Review, 95, p. 125-127


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  • Les Vénètes formaient une des populations indo-européennes qui a migré à partir du XIIIe siècle avant JC. Leur langue est connue par quelques deux cents inscriptions.


    Dans les textes de l'antiquité, il est question de quatre peuples homonymes situés dans différentes partie du monde occidental:

    les Hénètes d'Asie Mineure,

    les Vénètes de l'Adriatique,

    les Vénètes d'Armorique

    et les Wendes d'Europe Centrale.


    Un certain nombre d'indices montrent qu'il s'agissait d'une même population ayant migré par voie terrestre ou maritime à partir de la mer Noire jusqu'aux plaines d'Europe Centrale dans le bassin de la Vistule, en Europe du Nord en Baltique, ainsi que jusqu'au fond de l'Adriatique (Venise) et en Armorique (Bretagne Sud).
    Ainsi, en particulier, il existe une maladie cardiaque rare, d'origine génétique autosomique, dont les zones de répartition et de forte prévalence recoupent fidèlement celles où les Vénètes de l'Antiquité étaient installés(1) , ce qui fait d'eux un possible vecteur de dissémination.

     

    Les Hénètes d'Anatolie

    Dans la légende homérique de l'Iliade, les Hénètes sont un peuple d'Anatolie alliés des Troyens et descendant des Paphlagoniens.

    Ceux-ci auraient occupés un territoire montagneux de la Chaine Pontique, la Paphlagonie, situé entre les villes turques actuelles de Zonguldak et Bafra, en bordure de la mer Noire, dès l'âge du cuivre.

    Les Vénètes


    Ils auraient été parmi les premiers à domestiquer les chevaux sauvages des steppes d’Asie Centrale, les hémiones dont parle Homère.


    Après le sac de Troie, ils sont épargnés par les Grecs, selon la légende, et auraient essaimé vers l’Ouest par voies terrestre et maritime.

     

    Les Wendes d'Europe centrale


    Les Hénètes auraient remonté depuis la mer Noire le cours du Danube et des autres fleuves d’Europe Centrale, dont la Vistule, sur les rives de laquelle ils se sont établis, à la recherche de nouvelles routes commerciales.


    Ils y auraient côtoyé les Celtes, et probablement pris comme eux le relais de la culture d’Unetice (-2300 à -1500 avJC) (dans l'actuelle Tchéquie)(2) dans la région des Monts de Bohème riches en minerais nécessaires à la fonte du bronze.
    Puis ils auraient fréquenté les peuples de la Baltique en jalonnant la route de l’ambre(3).

    Leurs descendants seraient les Wendes d’Europe Centrale, décrits par les peuples germaniques, leurs voisins occidentaux(4) .


    La découverte récente dans la plaine hongroise de sépultures comportant des inscriptions vénètes, ainsi que de fosses d’inhumation de chevaux, attestent l’implantation des Vénètes en Pannonie au Ve siècle avant notre ère, avant les Celtes dans cette région . (5)


    L’auteur latin Tacite mentionne vers l’an 98 les Venethi, un peuple qu’il situe à la frontière entre le monde germanique sédentaire d’Europe centrale et celui des nomades Sarmates de la steppe d’Europe orientale.

     

    Les Vénètes de l'Adriatique


    Selon Virgile dans l’Eneide, sept a huit siècles après les textes homériques, les Hénètes aurait été en contact avec les peuples de Macédoine, de Sicile, puis avec les Carthaginois, au cours de leur expansion maritime.
    Ils auraient contribué au peuplement de l’Italie moyenne au contact des Etrusques, et de la riche plaine du Pô sous la conduite d’Antenor, conseiller de Priam, et de ses compagnons, selon la légende.
    Peut-être ont-ils reçu dans leurs pérégrinations l’aide des Phéniciens qui, eux, avaient déjà établi de nombreux comptoirs en Méditerranée, pour se déplacer jusque sur les cotes d’Italie.
    Les relations entre les Phéniciens et les Hénètes sont attestées par la similitude frappante qui existe entre leurs alphabets.
    Chypre, l’ile du cuivre, a sans doute été dès l’Age du Bronze un point de rencontre important entre les deux peuples.
    Les descendants des Hénètes auraient donc fondé Este, Padoue et Venise, mais se seraient peu mélangés aux peuples voisins, conservant le génie du travail du bronze et de l’élevage du cheval.
    L’historien Tite-Live, contemporain de Virgile et natif de Padoue, nous informe que les Vénètes de l’Adriatique se sont alliés aux Romains contre les Celtes dès le début du IIIe siècle av.JC. (épisode des oies de Capitole) et leur ont fourni un contingent d’auxiliaires durant la deuxième guerre punique.

    La langue vénète est attestée par plus de deux-cent-cinquante inscriptions remontant au Ve ou au VIe siècle avant J.-C. et retrouvées sur les sites des cinquante cités de la Vénétie antique. Puis elle disparait au Ier siècle avant J.-C., à l'époque de l'assimilation aux Latins, leur territoire devient la Xe région d'Italie sous le règne d'Auguste.

    Les Vénètes de l'Adriatique étaient installés sur un territoire approximativement délimité à l'ouest par l'Adige, au nord par les Alpes carniques, à l'est par le fleuve Timavus et au sud par la mer Adriatique.

    Les Vénètes

     

    Les invasions barbares des Marcomans sous le règne de Marc-Aurèle au IIè siècle dévaste leur territoire et les contraint à se replier sur les îles de la côte adriatique au début du Ve siècle, et en particulier à Ripa alta (Rialte puis Rialto) qui commerce avec Padoue autre ville Vénète: c'est ainsi que commence l'histoire de Venise.

     

    Les Vénètes d'Armorique

    La présence des Vénètes sur le sol de l’actuel pays morbihannais est attestée dès le début du premier millénaire avant notre ère.
    Comme pour les Wendes, leur expansion vers l’Ouest s’est faite dans des territoires "sans écriture" ce qui les plonge dans une période sans repères historiques. En 56 avant JC. César en décrivant leurs mœurs dans la Guerre des Gaules, fait rentrer les Vénètes d’Armorique dans l’Histoire.

    Les Vénètes semblent avoir eu un rôle clé dans les réseaux d'échanges de l'étain depuis l'âge du bronze.
    Ce métal est en effet nécessaire à la fabrication du bronze qui est un alliage fait d'une partie d'étain et de neuf de cuivre.


    La maitrise de la fusion du cuivre (à 1084 °C) s'était développée au VIIe millénaire en Anatolie (dans la région d'origine des Hénètes), avant de se répandre à l'ensemble du Bassin méditerranéen vers 2000 av.JC., le cuivre y étant par ailleurs abondant.
    L'étain au contraire fond à plus basse température (232 °C), il est très ductile et rend l'alliage avec le cuivre beaucoup plus dur et résistant, avec une température de fusion du mélange, le bronze, beaucoup plus facile à atteindre avec le bois comme combustible. En revanche l'étain n'est pas aussi répandu que le cuivre, et les sources d'approvisionnement en Méditerranée étaient épuisées au début du 1er millénaire.
    Le bronze peu oxydable et plus rigide que le cuivre devient rapidement un alliage à usage domestique et industriel et surtout un vecteur de suprématie militaire et l'objet de toutes les convoitises.

    On peut constater une grande diversité et une grande dispersion géographique des sites d'extraction des minerais et des sites de fonte du bronze. Cela a nécessité et entrainé une multiplication des voies maritimes et terrestres de transport des minerais, parfois sur de longues distances, sous forme de lingots d'étain, de cuivre ou de bronze. Celui-ci va devenir une monnaie d'échange pour le troc sur les voies commerciales Est-Ouest ou Nord-Sud comme la route de l'ambre entre la Baltique et l'Adriatique.
    Ces routes des métaux sont devenues stratégiques, surveillées par les peuples riverains qui prélevaient un droit de passage, en particulier dans la vallée du Rhône à l'époque de la Tène, pour rejoindre la Massilia grecque.

    La plupart des gisements d'étain se situaient aux limites occidentales les plus extrêmes du monde connu des Grecs de ces époques, la Galice au nord-ouest de l’Espagne actuelle, l’estuaire de la Loire, l’Armorique et la Cornouaille en Grande-Bretagne.

     

    Les Vénètes

     


    Pour les Grecs, l'étain provenait de l'archipel mythique des Iles Cassiterides (6).
    Il n'y avait pas de voie maritime phénicienne dans l'Atlantique Nord.
    Le transport de l'étain depuis ses sites d'extraction en Bretagne jusqu'aux mers Adriatique et Tyrrhénienne empruntait la voie fluviale et terrestre du cours de la Loire depuis son embouchure vers le delta du Rhône et à travers les Alpes par le Bugey et le lac de Constance, jusqu’à la plaine du Pô.(7)
    Cette dernière région se trouvait par ailleurs au débouché méridional d’une des routes de l’ambre, autre matière très recherchée à cette époque pour ses vertus magiques.
    De la, des routes commerciales terrestres et maritimes distribuaient l’étain d’Ouest en Est à travers l’ensemble du monde méditerranéen, routes dont les Vénètes d’Armorique étaient le maillon initial incontournable.

    Ils succédaient ainsi au complexe Campaniforme de la même région depuis le Bronze Ancien, qui assurait déjà un trafic trans-Manche de l'étain avant la lettre, depuis la Cornouaille jusqu’au Continent, sur des embarcations à carcasses de bois tendues de peaux d’animaux cousues (8).

    Par cette position, ils sont devenus un des plus puissants peuples de la Gaule, avec une organisation sociale très structurée et évoluée.


    C’est d'ailleurs sans doute pour cette raison que César tenait tant à défaire leur flotte au large du golfe du Morbihan, en 56 av.JC.
    A l’issue d’un combat naval incertain qui fut finalement favorable aux galères romaines et non aux robustes voiliers ventrus à hauts bords des Vénètes, César fit exécuter les membres du Sénat et déporta femmes et enfants en esclavage (9).

    Les Namnètes, peuple cousin des Vénètes, étaient installés sur l’embouchure de la Loire, dans le Pays Nantais auquel ils ont donne leur nom.

    Le devenir ultérieur des peuples Vénètes de l’Adriatique comme de Bretagne a été marqué par un isolement géographique qui a du contribuer a une relative endogamie, favorisant la résurgence de certains gènes délétères aux temps historiques plus récents.


    Les Vénètes de Gaule occupaient approximativement le territoire du Morbihan actuel, et sans doute une partie de la Loire-Atlantique, la région de Guérande.
    Les Vénètes de l’Adriatique ont du se réfugier au Ve siècle de notre ère sur les ilots insalubres de la lagune vénitienne ou régnait la malaria pour y fonder Venise, ils échappaient ainsi aux hordes barbares des Wisigoths et des Huns.

     

     

    (1) J.L. HEBERT, N. HEBERT, Y. LECARPENTIER: "Histoire des Vénètes, histoire de la diffusion de la dysplasie ventriculaire droite arythmogène (DVDA) à travers l'Europe" Réalités cardiologiques, Revues générales, 16 mars 2011.
    (2) BRIARD J. L’age du Bronze en Europe. Economie et societe, 2000-800 avant J.-C.,Editions Errance, Paris, 1997, chap. II –“Unetice, tumulus et Danube”, 23-50.
    (3) PLINE L'ANCIEN " Histoires naturelles"
    (4) VARNA Z. "Le monde Slave ancien". Cercle d'art, Paris, 1983.
    (5) LEJEUNE M. "Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres" 1990, 134 : 629-653

    (6) Il s'agissait d'un archipel de 10 îles de l'atlantique nord riches en étain (cassiteros en grec) citées par Hérodote, Strabon puis Pline l'ancien, au large de l'Ibérie, sans doute l'archipel des Açores.
    (7) VENDRYES J. "La route de l’étain en Gaule". Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-lettres, 1957 ; 101 : 204-209
    (8) ELLMERS D. "The earliest evidence for skinboats in late-Paleolithic Europe. Aspects of Maritime Archeology and Ethnography." National Maritime Museum, Greenwich. Edition Sean McGrail. 1982 ; 41-56.
    (9) CESAR; La Guerre des Gaules, livre IV


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