• 5 - La fin du Paléolithique en Europe

         A partir du 30eme millénaire environ et pendant 8000 ans, les archéologues identifient en Europe une nouvelle culture caractérisée par des pointes de projectile d'un type particulier, pointe de la Gravette(1), des lames de silex très droites et étroites et des pointes de sagaies en os.

     

    La fin du Paléolithique en Europe

    Lames lamelles et pointes La Gravette du site "Vigne Brun" (Loire)

     

    Les hommes du Gravettien ont remplacé les Aurignaciens avec une plus grande extension vers l'Oural. On les retrouve d'abord en Bulgarie et en Crimée dès 32.000 BP, puis en Autriche, Allemagne et en France entre -29 et -22.000 ans, en Italie, Belgique, Espagne et au sud de la Grande-Bretagne, et jusqu'en Russie à l'est.

     

    La fin du Paléolithique en Europe

            Carte de l'extension des Gravettiens en Europe entre -30.000 et -22.000 BP et principaux haplogroupes mitochondriaux.


    Du point de vue génétique, les dernières données montrent que ces Gravettiens étaient étroitement apparentés (2), étaient toujours du clan maternel U2 en Russie, en Belgique, en Italie et qu'une autre partie provenait d'un autre clan "soeur" U5 (clan Ursula) en Belgique, Tchéquie et Autriche, avec également des porteurs de U8 en Italie et Russie, et étonnamment le clan très ancien M à La Rochette en Dordogne et en Italie.(5)

     

    La fin du Paléolithique en Europe

     

    Les études de paléogénétique semblent ainsi confirmer le remplacement des Aurignaciens par des groupes Gravettiens chasseurs-cueilleurs européens qui se seraient apparemment étendus depuis la Russie vers l'ouest.(4)(3)

    La paléogénétique et l'étude des différences génétiques entres les sous populations régionales nous renseigne également sur le fait que ces premiers européens vivaient à travers les steppes en petites bandes de quelques dizaines d'individus et se reproduisaient avec une population globale assez réduite de quelques centaines d'hommes et de femmes.(5)

    Il en ressort également que les populations de l'ouest diffèrent génétiquement nettement de celle de l'est européen.

     

     

     La fin du Paléolithique en Europe

    Ces résultats sont un peu inattendu, car on retrouve par ailleurs une certaine homogénéité culturelle au niveau du continent européen:

    un culte des Vénus paléolithiques des Pyrénées jusqu'en Sibérie, et les premières traces de troc à grandes distances de l'ambre de la Baltique ou de coquilles de mollusques prouvent l'existence de relations entre ces petites populations dispersées.

     

    Venus von Willendorf (Autriche)

    Gravettien (-23.000 BP env.)

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                                         Art rupestre de la grotte du Pech Merle (Dordogne)

     

    Reconstitution du visage d'une femmeLa fin du Paléolithique en Europe

    gravettienne à partir de restes du site

    de l'Abri Pataud en Dordogne.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    A la fin du Gravettien, l’Europe entre dans le dernier maximum glaciaire du Würm, qui commence vers 23/22.000 BP pour atteindre son paroxysme vers 18.000 BP.

    Un vaste Inlandsis ou calotte glacière recouvrait alors tout le nord de l’Europe, du nord des îles Britanniques, la Scandinavie à la Sibérie.

    Le niveau des océans étant plus bas, il y avait totale continuité entre les Flandres et le sud des îles Britanniques, ainsi qu'entre les Balkans et l’Anatolie.

    Les territoires juste au sud de l’Inlandsis (sud de l’Angleterre, Bretagne, nord de la France, Belgique) sont couverts par la Toundra, une végétation de mousses et de lichens, sans arbres, parcourue par les rennes, les rhinocéros laineux, …


    Un peu plus au sud ( entre Seine et Loire) c’est la Taïga, une forêt claire de sapins et de bouleaux nains. Enfin le pourtour du bassin méditerranéen est couvert de forêts plus denses.

     

     

     

     

    Il y a eu un reflux des populations d’Europe vers le sud et la Méditerranée, en France, Espagne, Italie et Balkans à partir de 22.000 BP.

    On estime que la température moyenne était inférieure de 5°C à l'actuelle.

     

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    Ces populations sont partagées entre deux cultures:

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    Les Solutréens de -21.000 ans à -18.000 ans BP, sont plus nettement circonscrits au départ en Espagne et dans le sud-ouest de la France, puis remontent jusqu’au Bassin Parisien et la Saône ensuite.
    Leur outillage et leurs armes sont caractérisées par de fines lames de silex taillés en feuilles de sauge ou feuilles de laurier.(8)

     

     

    Les Epigravettiens sont caractéristiques de cette période à l’est des Alpes, en Europe centrale jusqu'au Don, et en Italie (-19.000/-15 à 12.000 BP) .

     

     

     

    A la période la plus froide, à partir de 18.500 ans jusqu’à 17.000 BP, la culture du Badegoulien (premier stade du Magdalénien) est seule retrouvée en région centre-ouest, bassin parisien et auvergne puis dans le sud-ouest et l’Espagne.


    A l'heure actuelle nous ne disposons d'aucune analyse génétique sur des ADN anciens permettant de préciser les haplogroupes de ces populations du maximum glaciaire.

    Génétiquement, l'haplotype H serait associé aux hommes du Solutréen entre la Loire, le Rhône et les Pyrénées, et les haplotypes U et R0 aux Solutréens en Espagne (6).

    Les Epigravettiens à l'est seraient plutôt caractérisés par l'haplotype K du clan "Katrine".

     


    La fin de la dernière glaciation s'est enclenchée vers -18.000 BP et le réchauffement à permis la recolonisation de terres septentrionales à partir du sud.


    Ainsi pendant tout ce Tardiglaciaire de 17.000 à 12.000 ans BP, l'archéologie identifie trois grandes cultures paléolithiques en Europe occidentale, essentiellement identifiées par leur formes différentes d'outillages et d'armes de chasse (7):

    Les Magdaléniens, de l’Espagne, jusqu'au nord de la France, la Suisse, le sud de l’Allemagne, la Pologne. La remontée de ces hommes a suivi celle des rennes, et ils ont continué à chasser le phoque sur les côtes du Portugal comme les Solutréens.


    Les Hambourgiens de 14.000 à 11.500 BP, dans le sud de l’Angleterre, les Flandres, le nord de l’Allemagne jusqu’à Hambourg, étaient des chasseurs de rennes de la toundra.


    Les Epigravettiens en Provence, Italie et Europe centrale,

     

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    Les chasseurs Magdaléniens avaient semble-t-il atteint une certaine "aisance" dans un climat tempéré froid assez stable avec une faune très riche, permettant une augmentation sans précédent de la population.

    Un campement de cette période retrouvé bien conservé au bord du Rhin révèle les traces de trois maisons bien établies, de tentes, d'outils, pointes d'ivoire, parures et statuettes, gravures d'animaux. Les campements étaient utilisés par d'importants groupes de chasseurs qui profitaient du gibier abondant, des chevaux sauvages ou des rennes, qu'ils suivaient vers le nord en été et vers le sud en hiver, mais en revenant toujours à leur base.


    Du point de vue génétique, les données actuelles (2017) indiquent la présence de clans maternels U8a en Allemagne et Belgique, U5 et U6 en Espagne, et U2 en France, des clans déjà présents chez les Gravettiens des millénaires précédents.

    Pour la première fois les haplogroupes H et H6 sont trouvés en Espagne sur deux individus, ce qui laisse supposer qu'un clan R0 dérivé d'un clan R par la mutation (73A) était déjà présent avant le maximum glaciaire, où bien que ce clan H (Hélena) est arrivé d'ailleurs.
    Selon les taux de mutations, les mutations caractéristiques de H et H6 seraient apparues il y a 13.000 ans(+/- 800) et 11.000 ans (+/-2000) respectivement, ce qui correspond assez à la population du Magdalénien.

    Pour les populations des régions de l'Epigravettien, on trouve pour le moment un individu U5b1 en Allemagne, U5b2 et U2 en Italie, et un K3 en Géorgie (le clan Katrine est une sous-clade de U8b).

     

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     Sources & Notes

    (1) du nom du site éponyme situé à Bayac en Dordogne

    (2) David Reich & al. "The genetic history of Ice Age Europe". Nature, 2016; DOI: 10.1038/nature17993

    (3) David Reich, "Who We Are and How We Got Here", Oxford University Press, 2018

    (4) E. Andrew Bennett et al, "The origin of the Gravettians: genomic evidence from a 36,000-year-old Eastern European" [archive], biorxiv.org, juillet 2019

    (5) E. Heyer. "L'odyssée des gènes". Flammarion 2020. p107

     (5) En tous cas, il n'y a pas été retrouvé pour le moment de porteurs des haplogroupes R0 ou HV à cette période qui précède le Dernier Maximum Glaciaire, comme on le supposait.

    (6) grotte de Nejra en Espagne.

    (7) M.Otte, P.Noiret. "Le Paléolithique supérieur européen", cours d’introduction générale. Univ. Liège

    (8) M. Otte. "Les Solutréens". Ed Errance 2018


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